Il est 7h du matin. Les narines sont déjà servies par l’odeur agréable dégagée par les céleris et autres ingrédients de la soupe au giraumon. On est le 1er janvier 2023, date marquant le 219e anniversaire de l’indépendance d’Haïti.

Peu de partage de souhaits. On dirait que les gens ont peur de prononcer “bonne année”. Comme si cela attirait les vieux démons : pays lock, crise politique, insécurité.

Aux Gonaïves, la seule tradition qui tient encore est le partage de cette soupe entre voisins et proches. Les gens délaissent totalement les autres aspects de la fête.

La cité de l’indépendance s’est réveillée morose. La ville est sale, la vente de carburant sur la chaussée est à plein régime dans la ville. En absence de décor et d’ambiance, les déchets s’imposent dans les rues. Ce jour se passe comme un jour ordinaire.

Les places publiques, emblème de nos vaillants ancêtres, sont colonisées de déchets et d’herbes sauvages.

La ville des Gonaïves se contente de rester passive à l’occasion de la fête de l’indépendance. Les autorités municipales semblent en panne d’inspiration. Depuis 2020, Gonaïves n’a pas pu entendre de discours d’un officiel sur la place Dame.

Le Premier ministre Ariel Henry qui a été évacué en catastrophe l’année dernière, n’a pas mis les pieds dans la ville pour prononcer son discours.

La ville est délaissée, le conseil municipal est démissionnaire depuis l’attaque contre l’agent exécutif intérimaire, Ronald Diogène, qui a perdu ses investissements dans la ville.

La plus grande place publique de la ville est abandonnée. Du haut de son estrade, l’empereur Jacques 1er souffre d’un manque de considération. De même pour les autres héros dont les effigies sont gravées sur les murs de la place. La place Pétion est également abandonnée. Peu de personnes fréquentent nos places en ce jour de fête nationale.

La place Bouteille, construite en mémoire de Boisrond Tonnerre dont l’histoire raconte que l’acte officiel de l’indépendance a été rédigé par cet écrivain en état d’ivresse en ce lieu, ressemble à un cimetière.

Dans la cité de l’indépendance, les banderoles pour annoncer que nous célébrons le 219e anniversaire de l’indépendance sont rares.

Cet homme assis sur la place D’Armes des Gonaïves se plaint de la situation. “Je me souviens comme si c’était hier quand ma tante m’a fait venir saluer Dessalines sur cette place. Je le faisais par ignorance. J’avais vu des gens rire de moi. Maintenant la place est abandonnée. Dessalines méritait mieux”, a-t-il lâché.

La tradition de fête de l’indépendance semble oubliée. Chaque année, les Gonaïviens passent un trait sur cette date symbolique. Il ne reste que la tradition de la soupe de l’indépendance.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *